L’alimentation salutaire : une évidence problématique

2. Evidence épidémiologique, comportements et recommandations

2.2 Alimentation et santé

L’alimentation a une influence notable sur la prévention des maladies. 130 millions d’Européens [2] souffrent d’une maladie d’origine alimentaire, dont la surcharge pondérale et l’obésité. Un régime alimentaire riche en graisses saturées, à fort contenu énergétique et comportant peu d’aliments d’origine végétale, ainsi qu’un mode de vie sédentaire, représentent les principales causes de l’épidémie paneuropéenne d’obésité et de surcharge pondérale, qui augmente les risques de contracter des maladies non transmissibles, dont les maladies cardiovasculaires, certains cancers et le diabète de type 2, ainsi que des caries dentaires (excès de sucre) et de l’hypertension (excès de sel).

Un tiers des cancers seraient dus à une alimentation déséquilibrée et 30 à 40% des cancers pourraient être prévenus par un meilleur régime alimentaire (OMS. 2001 ; 1).

Bien que de nombreux facteurs soient à l’origine des maladies cardio-vasculaires, parmi ceux- ci plusieurs sont liés à l’alimentation (dans les pays industrialisés, les maladies cardio- vasculaires sont la principale cause de mortalité. En Suisse, elles représentent environ 40% des décès). L’excès pondéral, par conséquent dans de nombreux cas une alimentation et une activité physique non appropriées, est le facteur de risque le plus important pour le diabète de type 2 (le diabète sous ses diverses formes représente la troisième raison des traitements ambulatoires). Il n’y a plus aucun doute que des facteurs environnementaux - et ici en particulier l’alimentation – ont une signification particulière dans l’apparition des cancers. Par exemple, en Suisse, le cancer du côlon est la troisième tumeur la plus fréquente chez l’homme et la deuxième chez la femme. La recherche épidémiologique démontre de manière convaincante qu’une consommation plus importante de fruits et de légumes ainsi qu’une activité physique régulière diminuent le risque des cancers colorectaux. (25% des décès en Suisse sont dus à des maladies cancéreuses, tous cancers confondus) (BAG, 12-16).

Un comportement alimentaire non désirable du point de vue de la santé signifie l’ingestion quotidienne de viande et de produits carnés, la préférence pour la viande rouge plutôt que blanche, la consommation non quotidienne de fruits et de légumes, ainsi que l’absorption d’alcool deux fois par jour (Eichholzer. 2000 ; 253).

En 1997, 22% de la population mangeait de la viande ou de la saucisse au moins une fois par jour (29% d’hommes et 15% de femmes) avec une personne sur cinq préférant la viande rouge plutôt que blanche. Un cinquième de l’échantillon ne consommait pas quotidiennement de légumes (24% d’hommes et 16% de femmes). Un tiers (44% d’hommes et 24% de femmes) ne mangeait pas de fruits tous les jours et près de 4% (6% d’hommes, 1.7% de femmes) buvaient plus de deux verres d’alcool par jour (Eichholzer. 2000 ; 255).

L’enquête suisse sur la santé 2002 permet de constater une diminution de la consommation quotidienne de viande de 2%. Une légère amélioration est à noter aussi pour la consommation journalière de légumes et salade qui est en augmentation aussi de 2%. Par contre, la consommation de fruits est restée stable, sauf chez les jeunes où on note une forte tendance à l’abandon de l’ingestion quotidienne de fruits : aujourd’hui, il ne reste pratiquement plus qu’un jeune sur deux qui mange des fruits tous les jours, contre trois sur cinq en 1992. D’une manière générale, plus on est jeune et moins on est formé, plus forte est la tendance à ne pas manger des légumes tous les jours. Le niveau de formation n’a quant à lui pas d’influence sur la consommation de fruits (OFS). Les Romands et Tessinois, ainsi que les personnes de nationalité étrangère et celles qui ont un niveau de formation moindre mangent moins de légumes. Par contre, les Alémaniques, les personnes d’un haut niveau de formation et les Suisses mangent moins de fruits (Eichholzer. 2000 ; 254-259).

L’enquête de 1997 montre que près d’un tiers des personnes sondées ne se préoccupe pas de son alimentation (40% d’hommes et 23% de femmes). Les principales raisons invoquées par les enquêté-e-s sont d’abord le plaisir de la table (45%), puis les habitudes et les contraintes quotidiennes (41%), la perception que la nourriture saine est chère (39%) et l’offre insuffisante des restaurants et des cantines (33%), etc. (Eichholzer. 2000 ; 266-267). En 2002, il en va à peu près de même, bien qu’on accorde plus d’importance au prix élevé de la nourriture saine et que l’offre des cantines soit légèrement mieux perçue (OFS).

Afin de se rapprocher des buts de l’OMS Europe concernant les substances alimentaires, la population suisse doit augmenter sensiblement sa consommation d’hydrates de carbones complexes et de fibres alimentaires, que l’on trouve plus particulièrement dans les céréales, les pommes de terre, les fruits et les légumes) et diminuer drastiquement la consommation de sucre et de miel, ainsi que de graisses, notamment saturées. L’ingestion de fruits et de légumes est en moyenne de 410 grammes par jour au lieu des 600 grammes recommandés et 25 grammes de fibres alimentaires quotidiennes sont ingérées, au lieu de 30 g (BAG ; 7-9).

La commission fédérale de l’alimentation a édité des recommandations pour une alimentation saine : manger un peu de tout, mais pas trop, manger plus de produits végétaux, ne pas manger de viande tous les jours, diminuer la consommation de graisses et préférer les graisses végétales, consommer quotidiennement des produits laitiers, faire attention à l’excès de sucre et de sel, boire au moins un litre, un litre et demi d’eau par jour, consommer des aliments frais et ne pas trop les cuire et enfin, avoir une activité physique suffisante.

La politique alimentaire de la Suisse poursuit entre autres les buts suivants : pour 2005, améliorer les connaissances de la population au sujet de la signification de la consommation de fruits et légumes dans le cadre d’une alimentation saine, afin que cette dernière augmente ; pour 2010, améliorer les connaissances des enfants en âge scolaire au sujet d’une alimentation saine et durable, ainsi que leur comportement alimentaire (BAG ; 22-24, 28, 30).

Suite...
3. L’espace social alimentaire et le système alimentaire (source : Poulain; 221-244)
4. L’évolution des habitudes alimentaires
5. Du paradoxe de l’homnivore à la gastro-anomie
Bibliographie

Claude Bezençon. Avril 2005

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