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Le maire de Bordeaux Hugues Martin jetant un bouquet de fleurs dans la Garonne le 10 mai 2006.

Bordeaux, qui a longtemps gardé le silence sur son histoire de port négrier, a profité mercredi de la journée nationale de commémoration de l'abolition de l'esclavage, pour rendre un hommage aux victimes de la traite et à Toussaint Louverture dont un buste a été érigé dans la ville.
Bordeaux, ancien port négrier, rend hommage aux victimes de la traite

10 mai 2006           

Bordeaux, qui a longtemps gardé le silence sur son histoire de port négrier, a profité mercredi de la journée nationale de commémoration de l'abolition de l'esclavage, pour rendre un hommage aux victimes de la traite.

"Ce moment de notre histoire, que nous réprouvons tous, ne doit pas être occulté", a affirmé le député-maire (UMP) de Bordeaux, Hugues Martin, au cours d'une cérémonie organisée sur les quais de la ville, à l'endroit même d'où partaient les navires armés pour la traite.

Deuxième port négrier de France après Nantes, Bordeaux fut le point de départ d'environ 500 expéditions qui déportèrent d'Afrique environ 130.000 hommes, femmes et enfants, selon l'historien Eric Saugera, auteur d'un livre de référence sur le sujet.

Le port "aura contribué à la prospérité de notre ville", a reconnu le maire qui a dévoilé une plaque commémorative de bronze. Il s'agit de faire "acte de réparation", a ajouté le maire de la ville dont le seul monument rappelant l'escalavage est un buste de Toussaint Louverture, père de l'indépendance de Haïti, inauguré en juin 2005.

La plaque commémorative a été installée au centre de l'ancien port de la Lune, au bord de la Garonne, aujourd'hui réaménagé en lieu de promenade.

"A la fin du XVIIe siècle, de ce lieu est parti le premier navire armé dans le port de Bordeaux pour la traite des Noirs", peut-on lire sur cette discrète plaque d'un mètre dix sur cinquante-cinq centimètres, scellée dans le sol.

"Notre présence exprime une indignation morale unanime", a déclaré Hugues Martin qui a ensuite jeté une gerbe de fleurs blanches dans le fleuve devant environ 200 personnes, essentiellement des élus locaux, des personnalités -dont l'écrivain martiniquais Patrick Chamoiseau- des membres d'associations et quelques badauds.

Il faut que "dans l'avenir, l'histoire de la traite à Bordeaux ne soit ni oubliée, ni minorée, ni dénaturée", a souligné le maire, souhaitant voir le musée d'Aquitaine "accorder une place plus importante à cette période de l'histoire bordelaise".

Le maire de Bordeaux a aussi demandé "une mise en réseau des ressources documentaires dont disposent d'autres grands ports européens comme Bristol, Bilbao et Porto", ainsi qu'une poursuite du travail historique avec d'autres villes françaises comme Nantes et La Rochelle.

L'élu devrait également s'inspirer des travaux du "comité de réflexion et de propositions sur la traite des Noirs à Bordeaux" lancé en juillet 2005 dans le but, a-t-il rappelé, de "pérenniser notre devoir de mémoire".

Le président du comité, l'écrivain Denis Tillinac, a d'ailleurs profité de la journée commémorative du 10 mai pour remettre son rapport final. Ce rapport devrait être rendu public en fin de mois après examen par le conseil municipal.

Parmi les propositions retenues par le comité, figure l'idée d'un mémorial consacré à la traite, a indiqué à la presse Denis Tillinac, ancien conseiller du président Jacques Chirac pour la Francophonie.

Ce mémorial est réclamé depuis des années par des associations locales, notamment DiversCités, qui ont accusé la ville d'occulter son passé de port négrier."Pour l'instant, il n'y a pas de décision claire", a déploré le président de DiversCité, Karfa Diallo, tout en soulignant "le geste courageux du maire".

"Pour l'instant, il n'y a pas de décision claire", a déploré le président de DiversCité, Karfa Diallo, tout en soulignant "le geste courageux du maire".

"La plaque commémorative est un peu discrète. On aurait pu l'augmenter de quelques centimètres", a-t-il plaisanté. Il a cependant reconnu que "c'est un début pour Bordeaux et c'est énorme", insistant sur la nécessité de ne pas "culpabiliser, ni de réactiver des querelles inutiles et vaines".